Tébriz
Le Tébrizli n'a rien de commun avec les anciens Perses; c'est un intrus sur
la terre de Cyrus. Les divers conquérants de Tébriz ont, au moyen âge, fait
égorger ou transporter dans l'Irak toute la population persane de la ville
qu'ils ont colonisée avec des Turcs. Les Persans de Tébriz qui descendent de
ces Turcs et s'appellent eux mêmes Turki, n'ont des Persans que la
religion : ils sont chiytes et les plus fanatiques des sectateurs d'Ali. Les
processions sanglantes du mois de Moharrem, où les plus zélés musulmans,
revêtus d'un cilice blanc, vont par les rues en se tailladant le corps à coup
de sabre, sont un des spectacles les plus répugnants que l'on puisse imaginer;
à Tébriz et au Caire seulement le fanatisme atteint de pareilles proportions.
La populace de la ville est tout entière dans la main des Mollahs et du grand
Mousteheyd qui, après le Mousteheyd de Kerbèla, le pape du chiysme, est le
personnage du clergé persan le plus influent et le plus ennemi des Européens et
des coutumes européennes. Sur un signe de lui les quartiers arménien et
européen seraient mis à sac. La crainte des Russes, dont les régiments
pourraient en deux jours accourir de l'Araxe à Tébriz, contient seule le
fanatisme et les rancunes du clergé chiyte qui ne supporte qu'avec impatience
la présence des chrétiens et voit avec colère leur influence grandir auprès du
Chah.
Quant à la langue des Tébrizli, c'est le turc oriental ou Djaghalaï,
qui ne ressemble que de loin à l’osmanli de Stamboul et n'est à vrai
dire qu'un patois dur et pauvre en mots, mais simple et, fort; il a
trente-trois lettres et s'écrit de droite à gauche comme l'arabe et le persan.
M. Edmond Le Cointe, Tébriz (Azerbaïdjan) // Revue de géographie. Seizième
année. Tome XXXI, Juillet-Décembre, 1892, p. 168.
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